L'art de faire parler la nature
Un nouveau festival mêle art et nature à Chaudfontaine. Une quinzaine de créations d'artistes belges et étrangers transforment le Parc de Hauster. Un premier pas dans un projet d'envergure qui évoluera au fil des saisons et des propositions.
JEAN-MARIE WYNANTS
De la route qui suit le cours de la Vesdre, on aperçoit entre deux rangées d'arbres une pince à linge géante enserrant un bout de pelouse. A l'arrière-plan, sur une longue façade grise, de grandes fleurs colorées illuminent le paysage. Dans un bosquet, cinq bouleaux aux troncs teintés de couleurs vives. Bienvenue au Festival des 5 saisons!
Dans le grand parc de Hauster, une quinzaine d'œuvres spécialement pensées pour le site donnent à ce lieu de promenade et de repos un visage nouveau. « L'idée est née il y a deux ans et demi, en visitant Chaumont-sur-Loire et son festival des jardins,explique l'échevin de la culture, Laurent Burton. Chaudfontaine est une petite commune avec un centre de thermalisme, un casino, l'usine d'embouteillage… On aurait pu se contenter de cela. Mais nous souhaitons que d'autres publics puissent découvrir la commune. Pour cela, nous misons sur la culture d'aujourd'hui. »
Le pari était osé. Il y a un an, la directrice artistique du projet, Dorothée Luczak, espérait pouvoir présenter cinq ou six œuvres pour une première étape. En huit mois, on en a vu fleurir une quinzaine dans un parc entièrement repensé par l'architecte Rita Occhiuto. De nouveaux chemins, des espaces de jardin appelés à se développer et des artistes s'inspirant du lieu pour créer.
Bob Verschueren, incontournable, fait surgir de jeunes peupliers dans les troncs évidés de trois arbres morts. Plus loin il crée un arbre de Babel à l'aide de quatre troncs d'arbres morts assemblés. Maro Avrabou et Dimitri Xenakis inventent un jardin où des barils de pétrole joyeusement colorés deviennent réceptacle pour des plantes aquatiques, aromatiques, vivaces et des arbustes. Le duo Marvayus crée un squelette imaginaire à partir d'un arbre du parc découpé en rondins…
Tous les artistes présents dialoguent avec les lieux, créant des œuvres séduisantes mais qui parlent aussi de notre terre, de ce que nous lui infligeons, de ce qu'elle nous cache et nous révèle.
Ainsi Mehmet Ali Uysal nous donne l'impression d'être des nains face à sa pince à linge géante. Les enfants escaladent la boursouflure et s'y font prendre en photo. Mais au-delà de la surprise, l'artiste nous rappelle que cette terre sur laquelle nous marchons chaque jour est aussi la peau malmenée d'une planète en péril. Peau encore chez Christine Mawet qui brode des feuilles de ginkgo pour créer d'étonnantes « fleurs ». Au pied de l'imposant ginkgo du parc, celles-ci vont subir les outrages du temps durant les mois à venir. Pour se souvenir de leur splendeur, leurs portraits géants sont suspendus sur la façade de la clinique du château des Thermes où l'on vient quêter une éternelle jeunesse.
Quant à Werner Moron, il a imaginé la chute au beau milieu du parc d'une météorite en forme de cœur. Au fil du temps (encore lui), sa création se transformera en étang. Mais pour l'instant, elle s'offre à nos yeux comme une blessure suintante, une plaie ouverte avec son argile rouge et ses traînées de brique pilée, rappelant l'état d'urgence environnemental dans lequel nous vivons.
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