Les sons inclassables s'exposent

John Cage et son piano préparé Le bruitage de feedback de guitare de l’album « Metal Music Machine » de Lou Reed, sorti en 1975 en vinyle On peut les écouter chez Archipel © 

CHARLINE VANHOENACKER






La Médiathèque de la Communauté française de Belgique a classé les musiques inclassables. Le Centre Pompidou, séduit par l'initiative, a décidé de les exposer. Ces bruits, sons et autres curiosités sont expliqués pour susciter une aventure musicale à destination du grand public.

Des larsens et des bruits de guitare électrique saturée : l'album de Lou Reed, Metal machine music (1975), faisait partie des 6.000 œuvres «inclassables» de la Médiathèque de la Communauté française de Belgique. Désormais, ce Lou Reed et des milliers d'autres titres qui composaient un fonds marginal font partie d'Archipel, ce «continent» des musiques inclassables qui a nourri les musiques actuelles, et qui ne demande qu'à s'enrichir.
Avec la médiation de la Médiathèque – des explications didactiques – ces curiosités deviennent accessibles au grand public : l'idée a séduit la Bibliothèque publique d'information de Paris, au Centre Pompidou, qui abrite l'exposition sonore Archipel depuis mercredi et jusqu'au 1er novembre, avant que celle-ci ne s'installe au MAC's du Grand-Hornu, à partir du 19 novembre.
Au premier étage du Centre Pompidou, des modules composés d'écrans tactiles, de casques et de tabourets permettent d'explorer le fonds des ex-«inclassables» par thèmes : recyclage, silence, utopie ou bruits (autant d'«îlots» de l'Archipel qui permettent une classification qui paraissait jusque-là impossible). Un site internet, www.archipels.be, sera mis en ligne le 19 novembre pour l'inauguration de l'exposition au MAC's.
«Notre mérite est d'avoir classé l'inclassable, explique Pierre Hemptinne, le directeur des collections Archipel. Depuis 50 ans de classement à la Médiathèque, on se rend compte qu'il y a énormément de musiques qui ne rentrent dans aucun segment : la musique a toujours besoin que surgissent des formes inclassables, comme la matière vivante chez les biologistes. Ça montre qu'une partie de la création musicale est contre la segmentation».
Le message d'Archipel, c'est que «ces musiques sont indispensables pour comprendre tout ce qu'il y a de vivant dans l'ensemble des musiques. Quand un artiste singulier, inclassable, crée quelque chose qu'on n'a jamais entendu, vous pouvez parier que dans dix ans, une partie de sa création va se retrouver dans les musiques populaires, que ce soit en jazz, rock ou en classique».

« Un rôle dans la société »
Pierre Hemptinne rappelle qu'en ce moment, ces musiques sont confinées dans des niches, qu'elles ne sont pas subventionnées et ne bénéficient pas de salles de concert: «Ces artistes originaux sont donc en passe de disparaître. Si c'est le cas, on va perdre beaucoup du rôle que joue la musique dans la société». Car souvent, ces artistes se nourrissent des nouveaux sons que la société en mutation produit.
Fadila Laanan, ministre de la Culture de la Communauté française, a fait le déplacement à l'occasion de la présentation d'Archipel au Centre Pompidou. Une vitrine du savoir-faire belge à Paris: «Ça signifie qu'en Belgique, nous avons des expertises qui comptent dans le secteur musical».



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